Comment écrire une bonne thèse ?
Écrire une bonne thèse : c’est un secret de polichinelle : écrire un mémoire de maîtrise ou une thèse de doctorat n’est pas de tout repos. Le syndrome de la page blanche et la procrastination sont l’apanage de nombreux étudiants aux études supérieures. Qu’à cela ne tienne, la directrice du programme de doctorat de psychologie et professeure de l’Université Laval, Geneviève Belleville, a plus d’un tour dans son sac afin de vous faciliter la tâche. Elle a d’ailleurs rassemblé ses astuces dans le livre Assieds-toi et écris ta thèse! Trucs pratiques et motivationnels, publié en 2014.La base de tout essai intéressant et bien documenté est une thèse solide. Un essai sans une idée centrale pour contrôler le contenu et l’orientation du texte laisse le lecteur (et bien sûr, votre professeur !) confus et dubitatif. En tant qu’auteur, l’énoncé de votre thèse sert à capter l’attention du lecteur, à fournir de l’information sur l’objet et le contenu de l’article et à définir votre position sur le sujet.
Vérifiez votre idée correspond à la tâche de l’article
Lisez attentivement les lignes directrices du devoir de votre enseignant ou toutes les instructions que vous avez reçues pour votre projet d’écriture. Assurez-vous de comprendre parfaitement les exigences du devoir et les résultats attendus. Avec toutes ces informations à l’esprit, il vous sera plus facile de comprendre le type de recherche que vous devez faire, la question à laquelle votre thèse devrait répondre et les objectifs que vous devriez atteindre. Si vous avez le moindre doute quant aux exigences du devoir, rapprochez-vous de votre professeur. Rencontrez-le après les cours, quand il est libre, ou envoyez-lui un email.
Si vous décidez de lui envoyer un courriel, n’oubliez pas de préciser votre nom et l’heure du cours dans la ligne objet.
Réfléchissezecr
Dès que vous aurez choisi un sujet, commencez à écrire tout ce que vous savez. Au cours du processus, établissez des liens entre les idées que vous connaissez déjà et essayez de vous poser des questions auxquelles vous n’êtes peut-être pas encore en mesure de répondre. Une vraie séance de réflexion consiste simplement à écrire tout ce qui vous vient à l’esprit, sans accorder beaucoup d’attention à l’organisation, au temps que vous avez passé ou aux résultats attendus. Cependant, il existe de nombreuses méthodes plus structurées que vous pouvez considérer. Pratiquez l’écriture libre. L’écriture libre est une technique qui consiste à se fixer un délai (habituellement de 5 à 10 minutes) et à écrire n’importe quoi sans arrêt jusqu’à ce que ce temps soit écoulé. Ne vous en faites pas pour la ponctuation, la grammaire, l’esthétique, etc. Le plus important, c’est de ne pas s’arrêter d’écrire. À la fin de l’exercice, vous devriez découvrir que vous en savez plus que vous ne le pensiez. Ensuite, vous devriez commencer à faire des liens entre les idées que vous avez .
Réalisez une carte cognitive. Cette technique consiste à dresser un genre de carte en notant certaines de vos idées et en reliant visuellement (en utilisant des couleurs ou en traçant des lignes entre les éléments connectés) des éléments qui partagent des caractéristiques similaires. Cela vous aidera à visualiser plus clairement les idées qui sont reliées entre elles .
Définir des moments pour rédiger
D’entrée de jeu, la professeure conseille de se réserver tous les jours de courtes périodes de temps pour la rédaction. Elle invite à réévaluer régulièrement la durée de ces moments. Pourquoi privilégier de courtes périodes à de longs blocs d’écriture? Afin d’éviter de procrastiner et de ressentir la pression de rédiger. S’il est important d’écrire le plus possible tous les jours, la professeure recommande tout de même de prendre des pauses libres de toute rédaction. « Quelqu’un qui réussit aux cycles supérieurs, c’est quelqu’un qui réussit à faire autre chose de sa vie, souligne-t-elle. C’est un peu paradoxal, mais ce que je veux dire, c’est que c’est quelqu’un qui s’investit dans ses études, mais qui parvient aussi à faire autre chose, que ce soit les soirs ou les fins de semaine. »
Fixer des objectifs
Mme Belleville avance que lorsqu’on rédige une thèse, il peut exister différents types d’objectifs : à long terme, précis ou hebdomadaire, de temps ou de projet. « Il ne faut pas croire qu’une maîtrise ou un doctorat soient faciles, il faut se donner des objecti,fs ou des motivations », explique-t-elle. Pour faciliter cette étape, la professeure suggère de s’inspirer des objectifs SMART. Cette méthode consiste à se fixer des buts spécifiques, mesurables, atteignables, réalistes et temporellement définis. Ainsi, il faudrait éviter de s’imposer comme tâche de compléter sa revue de littérature en 35 minutes, après une longue journée de travail!
Faites des recherches
Commencez par faire une recherche préliminaire. N’oubliez pas de choisir des sources fiables et réputées et de vous concentrer sur des domaines qui vous sont déjà familiers. Les sources de recherche les plus fiables sont les articles et les ouvrages savants que l’on peut trouver dans les bibliothèques et dans les bases de données académiques telles que World Cat ou dans Google Scholar. Choisissez des sites dont l’adresse se termine par .gov ou .edu qui seront plus fiables que les sites en .com ou en .org. Évitez les sources telles que Wikipédia, les blogs personnels et les sites non académiques en général. Une excellente façon de savoir si une source est fiable est de vérifier les compétences de l’auteur. Si l’auteur détient un doctorat dans un domaine connexe, il s’agit dans ce cas d’un expert. En revanche, si l’auteur est un blogueur ou un journaliste, il aurait des exigences moins strictes pour vérifier les faits .
Certains des sites non universitaires peuvent contenir des informations fiables ou indiquer d’autres sources fiables. Ils peuvent également être utiles pour obtenir des informations de base sur un sujet.
Déterminez ce qui vous intéresse
Parmi de nombreuses autres choses à considérer, une thèse solide doit être intéressante. Un sujet qui vous semble sans intérêt le sera également pour vos lecteurs. Essayez de vous concentrer sur une idée que vous avez vraiment envie de comprendre, car cela vous aidera à rendre votre article plus attrayant pour vos lecteurs. Gardez à l’esprit qu’il n’est pas toujours facile de trouver des informations sur un sujet qui vous intéresse. Si vos recherches préliminaires ne révèlent rien de valable, choisissez simplement un autre sujet.
Distinguer les étapes de rédaction
L’universitaire indique qu’il existe trois étapes majeures à la rédaction d’une thèse : la planification, la rédaction et la révision. Un plan bien établi permettrait de faciliter le début de l’écriture en réduisant le stress et l’hésitation. En ce qui concerne la rédaction, elle conseille d’écrire sans nécessairement trop se creuser la tête. Écrire rapidement ses idées, sans se questionner sur le choix de chaque mot, accélère le processus et évite de bloquer pendant trop longtemps à une étape précise. C’est lors de la révision qu’il devient important de bien peser l’importance de chaque phrase, de s’attarder à sa structure et son argumentation, de corriger ses coquilles et de soigner son style. « On écrit pour les autres, pas pour soi », insiste Mme Belleville.
L’inspiration, une excuse
Selon la professeure, attendre d’avoir de l’inspiration pour commencer à rédiger est une excuse pour procrastiner. « Ça ne prend pas d’inspiration pour écrire, il faut une méthode ou une structure », continue-t-elle. Pour Mme Belleville, les meilleures façons de se stimuler sont par exemple d’écrire quotidiennement et de conserver un carnet d’idées, de varier ses tâches et de parler de son sujet avec son entourage.
Expliquez le sujet du texte et énoncez votre point de vue
Le paragraphe introductif, qui contient votre thèse, est comme un aperçu du reste de l’article que vous écrivez. Il est crucial qu’il énonce qu’elle est l’idée centrale du texte et qu’elle est son importance. En lisant simplement votre thèse, le lecteur devrait déjà être capable de savoir quel sera votre point de vue, si vous êtes pour ou contre . Par exemple, examinez cet énoncé de thèse : « Étant donné que certains compléments à base de plantes médicinales entrainent une perte de poids rapide se traduisant par une perte de la masse corporelle maigre et des muscles, leur utilisation représente un danger potentiel pour la santé. » Notez que cette thèse met en évidence l’idée principale (évaluer les risques des compléments alimentaires à base de plantes), tout en montrant la prise de position de l’auteur (avertir sur les risques pour la santé) et présente également les preuves qui soutiennent cette affirmation (la perte de muscle et de masse corporelle maigre).
Fournissez au lecteur un plan
Orienter le lecteur fait partie des objectifs fondamentaux d’un énoncé de thèse. Le lecteur devrait avoir une compréhension claire de l’idée maitresse de votre article, de son idée de départ et en général, des conclusions que vous tirerez à la fin .
Éviter la procrastination
Les tâches de rédaction scientifique figurent parmi les activités les plus remises au lendemain », explique Mme Belleville. L’une des raisons derrière ce phénomène lors de la rédaction d’une thèse est l’anxiété que suscite celle-ci. En effet, la dernière étape d’un doctorat est aussi la plus importante, celle qui permet d’obtenir un diplôme ou non. Pourtant, plus souvent qu’autrement, la procrastination crée encore plus d’anxiété. Pour combattre la tendance à remettre au lendemain, Mme Belleville a quelques conseils. Premièrement, elle revient sur l’importance de planifier des courtes périodes de rédaction quotidiennes. Il est également nécessaire de se créer un endroit agréable et fonctionnel propice à la rédaction. Enfin, il faut se rappeler que tout le monde procrastine à un moment ou un autre, il ne faut donc pas dramatiser!
Résister au perfectionnisme!
Être perfectionniste n’équivaut pas à être productif, soutient Mme Belleville. La professeure avance que s’il est positif d’avoir des hautes attentes, avoir des attentes irréalistes revient à se tirer dans le pied : « La personne perfectionniste est souvent peu productive, parce qu’elle est paralysée par son perfectionnisme. » Pour elle, le culte du perfectionnisme s’apparente à celui d’une secte, « où les idéaux à atteindre sont séduisants, mais irréalistes ». Enfin, le perfectionnisme peut tout de même avoir certaines nuances : vouloir performer afin de se dépasser et s’en mettre trop sur les épaules sont deux enjeux différents, aux conséquences bien distinctes, de ce phénomène.
Discuter et garder contact
L’autrice termine sa présentation en insistant sur le fait « qu’il ne faut pas s’oublier lorsqu’on rédige une thèse ». S’enfermer et rester seul est loin d’être une bonne idée et il ne faut pas hésiter à parler de ses problèmes lorsqu’ils se pointent le bout du nez. La rédaction d’un tel projet n’est pas sans embûches et il ne faut pas l’oublier.
Présentez des preuves
Il est essentiel de montrer au lecteur que toutes vos affirmations sont basées sur des faits, pas seulement sur vos opinions ou vos lubies. Choisissez une partie (mais pas la totalité) de vos preuves dans l’énoncé de votre thèse pour prouver au lecteur que vous avez fait des recherches et que votre essai sera un compte rendu juste du sujet. Vous pouvez, soit fournir un exemple général de preuve, par exemple, « La technologie devrait être autorisée en classe parce qu’elle favorise l’apprentissage des élèves » ou mentionner les points connexes qui seront détaillés dans les paragraphes du corps du texte, par exemple, « La technologie devrait être autorisée en classe parce qu’elle renforce l’attention des élèves, réduit le niveau de stress et crée un environnement d’apprentissage diversifié. »
Revoyez votre thèse pour tenir compte des arguments contraires
Il est tout à fait acceptable de changer l’énoncé de votre thèse à mesure que vous avancez dans vos recherches, car de nouveaux éléments de preuves peuvent changer votre point de vue sur le sujet. Ne vous inquiétez pas de finir votre article avec un énoncé de thèse différent de la thèse initiale .
Faites une pause pour réviser
À la fin de la rédaction de l’ensemble du document, prenez un peu de temps pour vous éloigner du projet. Au bout de quelques jours, vous verrez votre travail avec un regard neuf en le relisant. Cela vous permettra de réviser avec plus de clarté, de voir si vos arguments sont cohérents et de déterminer si votre thèse représente exactement ce que vous essayez de démontrer. Voici quelques éléments à prendre en compte. Est-ce que vos arguments appuient la thèse tout au long du document ? Ne discutez pas de sujets qui ne lui correspondent pas. Il est important de ne pas s’écarter du sujet pour que votre article soit clair. Les idées de l’article reflètent-elles l’énoncé de votre thèse ?
Évitez d’énoncer simplement des faits
Une thèse devrait être une idée discutable. En d’autres termes, toute personne devrait être en mesure de l’étayer et d’argumenter le point de vue opposé . Voici un exemple d’une thèse faible basée uniquement sur un fait : « L’activité physique est bénéfique pour vous. » Avec ce genre de thèse, votre essai ne peut être que superficiel et sans intérêt. Des études montrent que le sport est bénéfique pour la santé et personne ne s’y opposerait.
Évitez de fournir des informations trop vastes et trop limitées
Rédiger une thèse est très délicat. Vous devez fournir suffisamment d’informations de base pour orienter le lecteur, sans pour autant partager et fournir trop de détails dans l’introduction. Les énoncés de thèse compréhensifs se basent sur des affirmations ambigües, vagues ou exagérées. Ils tentent d’aborder trop de sujets et n’ont aucune orientation claire. De même, une thèse étroite semble être trop simple ou trop spécifique pour être utilisé dans un essai bien développé . Voici un exemple d’une thèse compréhensive : « Sigmund Freud fait partie des plus grands psychologues de l’histoire de la médecine. » Il est trop général parce qu’il est trop vague et pourrait aborder presque n’importe quel sujet. Cet énoncé de thèse ne spécifie pas au lecteur l’idée principale de l’essai, ce qu’il peut en attendre et les preuves qui soutiennent cette affirmation. Maintenant, analysez cet exemple de thèse très précis : « Les théories du neurologue Sigmund Freud sur l’interprétation des rêves ont changé à elles seules l’évolution de la psychanalyse. »
Cette thèse est trop limitée, car elle n’admet qu’un seul point de vue (que la psychanalyse a été grandement façonnée par la pensée de Freud). Avec un tel énoncé, votre essai sera dépourvu de preuves (étant donné qu’il existe d’autres influences sur la psychanalyse).
Ne généralis
Le fait de tout généraliser, surtout dans les énoncés de thèse, est risqué, car vous aurez tendance à résumer tout le contenu de l’article en une seule idée globale tout en omettant les détails à l’appui. Avec une telle approche, vos affirmations sont faibles, car elles ne seront pas étayées par des preuves. Les thèses généralistes commencent habituellement par les phrases suivantes .
- « Tout se résume à … »
- « Tout ceci montre que… »
Conclusion
Certaines personnes préfèrent d’abord rédiger la thèse (et la plupart des lignes directrices sont destinées à ce style d’écriture), mais d’autres préfèrent d’abord écrire le corps du texte et découvrir au fur et à mesure leur argumentation. Parfois, on ne sait pas ce qu’on va dire tant qu’on ne l’a pas déjà dit. Ce qui fonctionne bien pour une personne peut ne pas être idéal pour une autre. Essayez de comprendre votre style d’écriture. Ne vous laissez pas entrainer dans des règles qui pourraient s’avérer contreproductives pour vous.
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